Sur cette page vous trouverez les dialectes des régions et des lieux que deux types de classification: classification traditionnelle de Louis Bonaparte Loucien classement Zuazo Koldo actuelle. En cliquant sur chacune d’elles, peuvent trouver la description du dialecte et les villes qui lui appartiennent.
Roncalais
Ce dialecte se parlait dans les sept villages de la vallée du Roncal (Roncal, Garde, Burgui, Isaba, Uztárroz, Vidángoz et Urzainqui). Il a aujourd´hui totalement disparu (dernière locutrice : Fidela Bernat +1991).
Dans la première classification du prince Bonaparte, le roncalais est considéré comme une variante du souletin ("souletin d´Espagne"), mais Resurrección María de Azkue amenda cette classification en lui donnant rang de dialecte autonome. Il est considéré comme tel dans le Dictionnaire Général Basque.
En effet, le roncalais est peut-être le plus différencié de tous les dialectes basques, par son isolement géographique : combinaison curieuse d´archaïsmes et d´innovations, comme le sont généralement les parlers marginaux.
Cependant, le dialecte est très bien connu car, de par sa propre situation précaire, il a suscité davantage d´intérêt que d´autres variantes plus vivaces. Nous possédons des textes très étendus en roncalais : traductions bibliques (Hualde Mayo, curé de Vidángoz), collections de cartes (de Mariano Mendigacha de Vidángoz), de longues transcriptions orales (surtout de Koldo Artola), vocabulaires, grammaires etc.
Véritable curiosité, le premier texte connu dans cette variante est un "reniement", formule d´apostasie, venant de Burgui, transcrit littéralement en euskara dans un procès en sorcellerie de 1596 (Florencio Idoate, La Brujería en Navarra y sus Documentos, 1978, p. 302). Déjà à l´époque, cet euskara était difficilement compréhensible des autres bascophones.
Avant sa disparition, un bilinguisme déséquilibré était caractéristique du Roncal (comme des autres vallées pyrénéennes), car les hommes avaient tendance à parler castillan entre eux, en raison de leurs longs séjours hivernaux dans la Bardena, tandis que les femmes étaient beaucoup plus bascophones.
Roncal appartient à la zone mixte.
Nous tenons à remercier Koldo Artola pour l´aide inestimable qu´ils nous a apportée, tant pour l´obtention de matériel (premier enregistrement), que pour transcrire et interpréter les enregistrements.
En dehors des caractéristiques générales de l´euskara parlé, le roncalais se distingue du standard par les traits suivants :
Morphologie (verbale, nominale), Phonétique, Lexique et Syntaxe.
MORPHOLOGIE
VERBALE
1-Les substantifs verbaux se composent avec -tan (général -ten): erraitan, egitan xoaitan, etc. Egalement xoaitako, et xoaitara (>-tra):
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Eta gero gizonak egitan zeia aigaria...
Umiak Franziara ezpartiña egitra
La terminaison -tzen que l´on trouve dans les autres dialectes est ici inexistante :
faltatan balin bazen zerbait, pues atziri! Atziri!
Eragutan balin banien... zomait gaiza
Pues gentan zeia karabineroak keben
2-Dans ces substantifs verbaux réapparaissent, dans le Roncal, les formes en -i- (xoaitan, emoitan), caractéristiques de l´euskara du Pays basque nord et d´une partie du haut-navarrais septentrional (mais inconnues dans le haut-navarrais méridional et dans les parlers pyrénéens frontaliers du Roncal) :
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
3-Le morphème nork à la première personne du singulier (basque unifié : -t: dut, dakit), présente une forme archaïque -d ou -r (selon Bonaparte, il s´agissait d´un son intermédiaire entre -d et -r, quelle qu´en soit la signification) : dur/dud, dakir/dakid:
Nik ez dakiar nola erakasi al gunien
entelegatu duna zer erran duran?
4-Il existe, dans le Roncal, une forme particulière d´expression du respect, lzuketz, également courante en souletin et bas-navarrais, mais inconnue dans le Pays basque péninsulaire.
5-Au passé des verbes synthétiques apparaît le -a-:
Baia ordian mitilak zaudia oletan
6-Comme à Salazar et Valcarlos, le morphème de la troisième personne du pluriel transitive est -e (en basque unifié : -te): dei, zein (voix familière zeia) `ont, avaient´:
banek egoixtan zeia kastaña, beste banek inzagur, beste bat... sagar! eta deiru ere bai
7-Le morphème des deuxièmes personnes du pluriel des transitifs est -zei (basque unifié : -zue):
Bordaureki eta guzietarik; zer ustezei?
8-Le préfixe relatif de causalité bait-, à Roncal, a la forme bit-:
9-Comme dans le dialecte de Salazar, le passé de izan `être´ a été régularisé en -za- (<izan): nintzan, zintzan, gintzan) :
Mendian! xoaitan ginzenian trabajatra
Aunque a veces hay vacilación con las formas más generales:
Xoaitan ginenian gaiaz zakuto bateki
10-Dans les potentiels, on utilise la racine -iro-, inconnue dans le Pays basque péninsulaire, généralement syncopée : droker etc.
11-Le morphème verbal -tu semble avoir une variante -tun (bien qu´il s´agisse peut-être d´un phénomène sporadique) :
12- Le futur des verbes se fait avec le suffixe -en, inclu dans les verbes se terminant par une voyelle :
Igarrien ginzela, que ya podríamos pasar
NOMINALE
13-L´adlatif est -ara (cf. dialecte de Salazar et souletin -ala), face à -ra dans les autres dialectes. Ce suffixe se comporte comme le locatif -an, c´est à dire comme s´il commençait par une consonne : mendiara, bordara (comme mendian, bordan) mais lurreara, avec la voyelle de liaison -e- (comme lurrean):
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Cependant, dans les démonstratifs, on utilise -at, comme dans le basque continental :
"Esta ez´ztei xuan korrat! xi´ztei konat!
14-La marque de l´associatif est -eki (basque unifié -ekin):
Pues gero ni aziendareki mendiala
Guazen aingurieki/arkanxalieki
15-Les démonstratifs présentent un k- initial, comme dans le dialecte de Salazar (en aezcoan g-):
Orai artian bai, eztakiar, daudenak korietan.
Agian ehin, edo berrehin edo kolaxet, txiki
Enaguak eta bordauak korradraino
"Esta ez´ztei xuan korrat! xi´ztei konat!
Pero en usos marginales, como el pronombre de respeto hori `usted, vuecencia´, aparecen formas sin k-, tal vez por importación de otros dialectos:
16-Mais dans les usages marginaux, comme le pronom respectueux hori "vous, votre excellence", apparaissent des formes sans k-, peut-être importées d´autres dialectes: :
Eta ni xoaitan zrenian ene aitatamak ordeñatra
17-Dans des mots comme artzai, arrai, etc., le roncalais présente toujours des formes en -ai, ce en quoi il s´éloigne du souletin et des parlers basco-français (-ain) et s´aligne sur tous les autres dialectes péninsulaires centraux (sauf le baztanais).
18-Comme dans le haut-navarrais méridional, le dialecte de Salazar et d´Aezkoa, il établit une distinction entre nor et nork dans la déclinaison plurielle (-ak/-ek):
banek egoixtan zeia kastaña, beste banek inzagur, beste bat... sagar! eta deiru ere bai
Mais on trouve parfois des hésitations, peut-être du fait de l´érosion linguistique :
Eta gero gizonak egitan zeia aigaria...
Pues gentan zeia karabineroak keben
19-Le roncalais use librement de syntagmes à l´indéfini, y compris dans les cas qui aujourd´hui seraient tout à fait impossibles dans la plupart des dialectes (archaïsme) : oskireki, bordaureki, klaboreki:
Bordaureki eta guzietarik; zer ustezei?
banek egoixtan zeia kastaña, beste banek inzagur, beste bat... sagar! eta deiru ere bai
Eta xoaitan gitia oskireki eta klaboreki et´oro
20-Le cas nondik au pluriel et à l´indéfini se termineen -tarik, comme dans le haut-navarrais méridional, le baztanais et le parler d´Ultzama :
Bordaureki eta guzietarik; zer ustezei?
21-Bien que dans les autres cas, le suffixe employé soit -ti(k), pour les noms de lieux réapparaît -rik (il s´agit d´un archaïsme) :
Bat gunia ta xin gizia Uruñarik
22-Le cas noraino se construit avec un étrange suffixe -adraino, -aradraino (le premier élément est sans doute -ara). Le -d- est une séquelle de la flexion verbale *daino (<*edin), qui, selon Michelena, est présente dans ce morphème :
Enaguak eta bordauak korradraino
hasta mayo, pasábamos, maiatzaradraino
Cependant, apparaît aussi la forme plus générale -raino:
PHONETIQUE
23-La caractéristique la plus remarquable du roncalais, qu´il partage d´ailleurs avec le souletin, vient du fait qu´il ne sonorise pas les occlusives après un phonème sonnant : hanti, kebenko, onki, etc:
Eta amaborz urtetan oiltun zeia... Franziara, niri
Aber onki egitan dugunez ezpartiña
Eta bueltatu zeia atziri, bortia ganti, pa España
24-La diphtongue au se transforme parfois en ai, comme en souletin : gai, gaiza, jeina:
Xoaitan ginenian gaiaz zakuto bateki
Eragutan balin banien... zomait gaiza
25-Et aussi, parallèlement, eu se transforme en ei:
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
26-La perte d´une voyelle à l´intérieur d´un mot (syncope) est très fréquente :
*Dans les noms communs (abrats, obro, Erribra, abre etc):
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
Bizi nun ni hogeitalaur urte obro ezik ama
ene tenpran, urte batez, utzu guntia
**Dans la déclinaison et dans la conjugaison : -tra (<-tera), -truk (-<turik) zren (<ziren), zra (<zara). Mais cf -tarik, toujours sans syncope :
Mendian! xoaitan ginzenian trabajatra
Umiak Franziara ezpartiña egitra
Eta ni xoaitan zrenian ene aitatamak ordeñatra
"Esta ez´ztei xuan korrat! xi´ztei konat!
27- Sont caractéristiques du roncalais (et du souletin) les assimilations vocaliques du type uturri (< iturri), Uruña (<Iruña), c´est à dire i...u, e...u > u...u: Uturri, gaztulu, ainguru, bagunu (<baginu ou bagenu):
Guazen aingurieki/arkanxalieki
Bat gunia ta xin gizia Uruñarik
ene tenpran, urte batez, utzu guntia
Bien que l´assimilation contraire (au profit du i) existe également:
Baia ordian mitilak zaudia oletan
28-Le hiatus -ea- se prononce -ia-, comme dans bien d´autres dialectes :
Orai artian bai, eztakiar, daudenak korietan.
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
Mendian! xoaitan ginzenian trabajatra
Umiak Franziara ezpartiña egitra
Bien que parfois il y ait des hésitations:
Gore erregiaren/Xinko Semearen/adorazera
29-Le hiatus -oa-, en revanche, semble mieux se conserver :
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Bien que parfois l´on puisse entendre -ua-:
Guazen aingurieki/arkanxalieki
30-Le hiatus -ua- se prononce -ia-, comme en souletin et dans une partie du bas-navarrais : buria, gunien (<*gunuen, cf. conditionnel bagunu), guntien (<*guntuen) guzia (<*guzua, thème nu guzu, cf. dans la déclinaison guzutik etc.), forme du relatif dien (<duen, cf forme libre du):
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Baia ordian mitilak zaudia oletan
Nik ez dakiar nola erakasi al gunien
Etsokandria emoiten diena ogia
Eta bueltatu zeia atziri, bortia ganti, pa España
paper batan, dozena... guntienak
31-Dans des mots comme jan, joan, jautsi, etc., le son initial est en roncalais, comme dans le dialecte d´Aezkoa, de Salazar et dans une partie du haut-navarrais méridional, x-: xan, xoan, etc. :
Gore erregiaren/Xinko Semearen/adorazera
Seule la jota castillane s´entend dans les emprunts récents :
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
Mais absolument pas dans les emprunts d´une certaine ancienneté :
Guazen aingurieki/arkanxalieki
32-Le roncalais est à peine contracté dans la déclinaison. On entend amaren, amareki, etc., comme dans les formes écrites :
Pues gero ni aziendareki mendiala
Lau pezetareki bueltatu Uztarrozera
33-L´harmonisation vocalique n´existe pas.
34-Le suffixe roman -ón, comme dans le haut-navarrais méridional et dans la quasi-totalité du haut-navarrais septentrional, s´adapte en -on, alors que l´accomodation plus commune est oi(n): kajona, montona, millona... etc. :
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
35-Les changements que produit le préfixe verbal bait- (roncalais beit-/bit-) ajouté à une flexion, sont distincts de ceux de la langue standard, et identiques à ceux du haut-navarrais méridional : bigunien (=baikenuen), bizen (=baitzen), mais bitago (=baitago), comme dans la langue standard :
36-Il n´y a pas de palatalisation automatique après le i :
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Xoaitan ginenian gaiaz zakuto bateki
Les sons palataux (ll, tt, ñ) s´entendent uniquement dans les formes diminutives ou dans les emprunts :
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Umiak Franziara ezpartiña egitra
Eta ni xoaitan zrenian ene aitatamak ordeñatra
LEXIQUE
Le roncalais est un dialecte très caractérisé par son lexique, et par d´autres traits.
37-D´une part, il a recours à de nombreux termes et formes qui lui sont propres, ou partagés exclusivement avec le souletin, comme par exemple : ekun `avoir´ (cf. basque continental ukhan, ukhen), erkin `sortir, txiki `peu´, hiror `trois´, ñotto `petit´, bana `quelques´, borta `porte´, aigari `dîner´, deiru `argent´, intzagur `noix´, etse `maison´, emon `donner (comme en biscayen), ler `pin´, oiltu `envoyer´, atziri `derrière´, izari ´mettre´, gentu `enlever´, ganti `à travers´ (souletin bas-navarrais gainti, gaindi):
38-Il partage également bon nombre de termes avec les autres parlers pyrénéens (salazarien et aezcoan) : ele `mot´, et ele erran `parler (cf. aezcoan elekatu `converser´), baia ´mais´, eur `personne (salazarien ior), eragu ´apporter, igari "passer".
39-D´autres termes typiquement roncalais sont en réalité des archaïsmes autrefois très répandus en euskara, mais qui sont toujours en usage dans cette vallée : kaur `ce´, laur `quatre´, ola `cabane´, solo `seulement (cf. Leizarraga solament).
40-D´autre part, le roncalais est un dialecte nettement oriental, c´est à dire qu´il partage une grande partie de son lexique et ses variantes lexicales avec les parlers basques continentaux : zomat `combien´, egotzi `jeter, orai `maintenant´, aitzin devant´, gibel `derrière´, xin `venir´, artio `jusque´, baratu `rester´, bortu `montagne, pyrénéen´.
SYNTAXE
41-Outre le traitement du zuketz, en roncalais était en usage une forme de respect similaire à celle du castillan, avec le pronom horrek =usted, vuecencia (vous) et une conjugaison à la troisième personne. La forme même du pronom (cf. le démonstratif korrek) semble indiquer une importation d´autres dialectes:
42-L´objet des substantifs verbaux peut être au génitif :
Gore erregiaren/Xinko Semearen/adorazera
43-Le suffixe verbal interrogatif -a existe comme en souletin et en aezcoan :
entelegatu duna zer erran duran?
44-Les comparatifs se font avec la particule ezik placée devant le terme de comparaison (cf. en euskara de Barranca l´emploi de ze):
Bizi nun ni hogeitalaur urte obro ezik ama
45-Dans les interrogatives indirectes absolues on emploie le suffixe -nez, comme en aezcoan et dans le dialecte de Salazar :
Aber onki egitan dugunez ezpartiña
46- Les relatifs ont tendance à être postposés. Cela pourrait être dû au castillanisme, mais la même caractéristique apparaît constamment dans les lettres de Mendigacha, et en réalité il doit s´agir d´un archaïsme (cf. Leizarraga anhitz Saindu lo ceunÿanen gorputzac iaiqui citecen. et similaires) :
Eta tio eramaitan guniena lagun
Roncalais
Ce dialecte se parlait dans les sept villages de la vallée du Roncal (Roncal, Garde, Burgui, Isaba, Uztárroz, Vidángoz et Urzainqui). Il a aujourd´hui totalement disparu (dernière locutrice : Fidela Bernat +1991).
Dans la première classification du prince Bonaparte, le roncalais est considéré comme une variante du souletin ("souletin d´Espagne"), mais Resurrección María de Azkue amenda cette classification en lui donnant rang de dialecte autonome. Il est considéré comme tel dans le Dictionnaire Général Basque.
En effet, le roncalais est peut-être le plus différencié de tous les dialectes basques, par son isolement géographique : combinaison curieuse d´archaïsmes et d´innovations, comme le sont généralement les parlers marginaux.
Cependant, le dialecte est très bien connu car, de par sa propre situation précaire, il a suscité davantage d´intérêt que d´autres variantes plus vivaces. Nous possédons des textes très étendus en roncalais : traductions bibliques (Hualde Mayo, curé de Vidángoz), collections de cartes (de Mariano Mendigacha de Vidángoz), de longues transcriptions orales (surtout de Koldo Artola), vocabulaires, grammaires etc.
Véritable curiosité, le premier texte connu dans cette variante est un "reniement", formule d´apostasie, venant de Burgui, transcrit littéralement en euskara dans un procès en sorcellerie de 1596 (Florencio Idoate, La Brujería en Navarra y sus Documentos, 1978, p. 302). Déjà à l´époque, cet euskara était difficilement compréhensible des autres bascophones.
Avant sa disparition, un bilinguisme déséquilibré était caractéristique du Roncal (comme des autres vallées pyrénéennes), car les hommes avaient tendance à parler castillan entre eux, en raison de leurs longs séjours hivernaux dans la Bardena, tandis que les femmes étaient beaucoup plus bascophones.
Roncal appartient à la zone mixte.
Nous tenons à remercier Koldo Artola pour l´aide inestimable qu´ils nous a apportée, tant pour l´obtention de matériel (premier enregistrement), que pour transcrire et interpréter les enregistrements.
En dehors des caractéristiques générales de l´euskara parlé, le roncalais se distingue du standard par les traits suivants :
Morphologie (verbale, nominale), Phonétique, Lexique et Syntaxe.
MORPHOLOGIE
VERBALE
1-Les substantifs verbaux se composent avec -tan (général -ten): erraitan, egitan xoaitan, etc. Egalement xoaitako, et xoaitara (>-tra):
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Eta gero gizonak egitan zeia aigaria...
Umiak Franziara ezpartiña egitra
La terminaison -tzen que l´on trouve dans les autres dialectes est ici inexistante :
faltatan balin bazen zerbait, pues atziri! Atziri!
Eragutan balin banien... zomait gaiza
Pues gentan zeia karabineroak keben
2-Dans ces substantifs verbaux réapparaissent, dans le Roncal, les formes en -i- (xoaitan, emoitan), caractéristiques de l´euskara du Pays basque nord et d´une partie du haut-navarrais septentrional (mais inconnues dans le haut-navarrais méridional et dans les parlers pyrénéens frontaliers du Roncal) :
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
3-Le morphème nork à la première personne du singulier (basque unifié : -t: dut, dakit), présente une forme archaïque -d ou -r (selon Bonaparte, il s´agissait d´un son intermédiaire entre -d et -r, quelle qu´en soit la signification) : dur/dud, dakir/dakid:
Nik ez dakiar nola erakasi al gunien
entelegatu duna zer erran duran?
4-Il existe, dans le Roncal, une forme particulière d´expression du respect, lzuketz, également courante en souletin et bas-navarrais, mais inconnue dans le Pays basque péninsulaire.
5-Au passé des verbes synthétiques apparaît le -a-:
Baia ordian mitilak zaudia oletan
6-Comme à Salazar et Valcarlos, le morphème de la troisième personne du pluriel transitive est -e (en basque unifié : -te): dei, zein (voix familière zeia) `ont, avaient´:
banek egoixtan zeia kastaña, beste banek inzagur, beste bat... sagar! eta deiru ere bai
7-Le morphème des deuxièmes personnes du pluriel des transitifs est -zei (basque unifié : -zue):
Bordaureki eta guzietarik; zer ustezei?
8-Le préfixe relatif de causalité bait-, à Roncal, a la forme bit-:
9-Comme dans le dialecte de Salazar, le passé de izan `être´ a été régularisé en -za- (<izan): nintzan, zintzan, gintzan) :
Mendian! xoaitan ginzenian trabajatra
Aunque a veces hay vacilación con las formas más generales:
Xoaitan ginenian gaiaz zakuto bateki
10-Dans les potentiels, on utilise la racine -iro-, inconnue dans le Pays basque péninsulaire, généralement syncopée : droker etc.
11-Le morphème verbal -tu semble avoir une variante -tun (bien qu´il s´agisse peut-être d´un phénomène sporadique) :
12- Le futur des verbes se fait avec le suffixe -en, inclu dans les verbes se terminant par une voyelle :
Igarrien ginzela, que ya podríamos pasar
NOMINALE
13-L´adlatif est -ara (cf. dialecte de Salazar et souletin -ala), face à -ra dans les autres dialectes. Ce suffixe se comporte comme le locatif -an, c´est à dire comme s´il commençait par une consonne : mendiara, bordara (comme mendian, bordan) mais lurreara, avec la voyelle de liaison -e- (comme lurrean):
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Cependant, dans les démonstratifs, on utilise -at, comme dans le basque continental :
"Esta ez´ztei xuan korrat! xi´ztei konat!
14-La marque de l´associatif est -eki (basque unifié -ekin):
Pues gero ni aziendareki mendiala
Guazen aingurieki/arkanxalieki
15-Les démonstratifs présentent un k- initial, comme dans le dialecte de Salazar (en aezcoan g-):
Orai artian bai, eztakiar, daudenak korietan.
Agian ehin, edo berrehin edo kolaxet, txiki
Enaguak eta bordauak korradraino
"Esta ez´ztei xuan korrat! xi´ztei konat!
Pero en usos marginales, como el pronombre de respeto hori `usted, vuecencia´, aparecen formas sin k-, tal vez por importación de otros dialectos:
16-Mais dans les usages marginaux, comme le pronom respectueux hori "vous, votre excellence", apparaissent des formes sans k-, peut-être importées d´autres dialectes: :
Eta ni xoaitan zrenian ene aitatamak ordeñatra
17-Dans des mots comme artzai, arrai, etc., le roncalais présente toujours des formes en -ai, ce en quoi il s´éloigne du souletin et des parlers basco-français (-ain) et s´aligne sur tous les autres dialectes péninsulaires centraux (sauf le baztanais).
18-Comme dans le haut-navarrais méridional, le dialecte de Salazar et d´Aezkoa, il établit une distinction entre nor et nork dans la déclinaison plurielle (-ak/-ek):
banek egoixtan zeia kastaña, beste banek inzagur, beste bat... sagar! eta deiru ere bai
Mais on trouve parfois des hésitations, peut-être du fait de l´érosion linguistique :
Eta gero gizonak egitan zeia aigaria...
Pues gentan zeia karabineroak keben
19-Le roncalais use librement de syntagmes à l´indéfini, y compris dans les cas qui aujourd´hui seraient tout à fait impossibles dans la plupart des dialectes (archaïsme) : oskireki, bordaureki, klaboreki:
Bordaureki eta guzietarik; zer ustezei?
banek egoixtan zeia kastaña, beste banek inzagur, beste bat... sagar! eta deiru ere bai
Eta xoaitan gitia oskireki eta klaboreki et´oro
20-Le cas nondik au pluriel et à l´indéfini se termineen -tarik, comme dans le haut-navarrais méridional, le baztanais et le parler d´Ultzama :
Bordaureki eta guzietarik; zer ustezei?
21-Bien que dans les autres cas, le suffixe employé soit -ti(k), pour les noms de lieux réapparaît -rik (il s´agit d´un archaïsme) :
Bat gunia ta xin gizia Uruñarik
22-Le cas noraino se construit avec un étrange suffixe -adraino, -aradraino (le premier élément est sans doute -ara). Le -d- est une séquelle de la flexion verbale *daino (<*edin), qui, selon Michelena, est présente dans ce morphème :
Enaguak eta bordauak korradraino
hasta mayo, pasábamos, maiatzaradraino
Cependant, apparaît aussi la forme plus générale -raino:
PHONETIQUE
23-La caractéristique la plus remarquable du roncalais, qu´il partage d´ailleurs avec le souletin, vient du fait qu´il ne sonorise pas les occlusives après un phonème sonnant : hanti, kebenko, onki, etc:
Eta amaborz urtetan oiltun zeia... Franziara, niri
Aber onki egitan dugunez ezpartiña
Eta bueltatu zeia atziri, bortia ganti, pa España
24-La diphtongue au se transforme parfois en ai, comme en souletin : gai, gaiza, jeina:
Xoaitan ginenian gaiaz zakuto bateki
Eragutan balin banien... zomait gaiza
25-Et aussi, parallèlement, eu se transforme en ei:
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
26-La perte d´une voyelle à l´intérieur d´un mot (syncope) est très fréquente :
*Dans les noms communs (abrats, obro, Erribra, abre etc):
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
Bizi nun ni hogeitalaur urte obro ezik ama
ene tenpran, urte batez, utzu guntia
**Dans la déclinaison et dans la conjugaison : -tra (<-tera), -truk (-<turik) zren (<ziren), zra (<zara). Mais cf -tarik, toujours sans syncope :
Mendian! xoaitan ginzenian trabajatra
Umiak Franziara ezpartiña egitra
Eta ni xoaitan zrenian ene aitatamak ordeñatra
"Esta ez´ztei xuan korrat! xi´ztei konat!
27- Sont caractéristiques du roncalais (et du souletin) les assimilations vocaliques du type uturri (< iturri), Uruña (<Iruña), c´est à dire i...u, e...u > u...u: Uturri, gaztulu, ainguru, bagunu (<baginu ou bagenu):
Guazen aingurieki/arkanxalieki
Bat gunia ta xin gizia Uruñarik
ene tenpran, urte batez, utzu guntia
Bien que l´assimilation contraire (au profit du i) existe également:
Baia ordian mitilak zaudia oletan
28-Le hiatus -ea- se prononce -ia-, comme dans bien d´autres dialectes :
Orai artian bai, eztakiar, daudenak korietan.
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
Mendian! xoaitan ginzenian trabajatra
Umiak Franziara ezpartiña egitra
Bien que parfois il y ait des hésitations:
Gore erregiaren/Xinko Semearen/adorazera
29-Le hiatus -oa-, en revanche, semble mieux se conserver :
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Bien que parfois l´on puisse entendre -ua-:
Guazen aingurieki/arkanxalieki
30-Le hiatus -ua- se prononce -ia-, comme en souletin et dans une partie du bas-navarrais : buria, gunien (<*gunuen, cf. conditionnel bagunu), guntien (<*guntuen) guzia (<*guzua, thème nu guzu, cf. dans la déclinaison guzutik etc.), forme du relatif dien (<duen, cf forme libre du):
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Baia ordian mitilak zaudia oletan
Nik ez dakiar nola erakasi al gunien
Etsokandria emoiten diena ogia
Eta bueltatu zeia atziri, bortia ganti, pa España
paper batan, dozena... guntienak
31-Dans des mots comme jan, joan, jautsi, etc., le son initial est en roncalais, comme dans le dialecte d´Aezkoa, de Salazar et dans une partie du haut-navarrais méridional, x-: xan, xoan, etc. :
Gore erregiaren/Xinko Semearen/adorazera
Seule la jota castillane s´entend dans les emprunts récents :
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
Mais absolument pas dans les emprunts d´une certaine ancienneté :
Guazen aingurieki/arkanxalieki
32-Le roncalais est à peine contracté dans la déclinaison. On entend amaren, amareki, etc., comme dans les formes écrites :
Pues gero ni aziendareki mendiala
Lau pezetareki bueltatu Uztarrozera
33-L´harmonisation vocalique n´existe pas.
34-Le suffixe roman -ón, comme dans le haut-navarrais méridional et dans la quasi-totalité du haut-navarrais septentrional, s´adapte en -on, alors que l´accomodation plus commune est oi(n): kajona, montona, millona... etc. :
Ehin duro kajonian, z(r)ia abrats,
35-Les changements que produit le préfixe verbal bait- (roncalais beit-/bit-) ajouté à une flexion, sont distincts de ceux de la langue standard, et identiques à ceux du haut-navarrais méridional : bigunien (=baikenuen), bizen (=baitzen), mais bitago (=baitago), comme dans la langue standard :
36-Il n´y a pas de palatalisation automatique après le i :
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Xoaitan ginenian gaiaz zakuto bateki
Les sons palataux (ll, tt, ñ) s´entendent uniquement dans les formes diminutives ou dans les emprunts :
Eta fajoak eramaitan guntia burian llarrainiara
Umiak Franziara ezpartiña egitra
Eta ni xoaitan zrenian ene aitatamak ordeñatra
LEXIQUE
Le roncalais est un dialecte très caractérisé par son lexique, et par d´autres traits.
37-D´une part, il a recours à de nombreux termes et formes qui lui sont propres, ou partagés exclusivement avec le souletin, comme par exemple : ekun `avoir´ (cf. basque continental ukhan, ukhen), erkin `sortir, txiki `peu´, hiror `trois´, ñotto `petit´, bana `quelques´, borta `porte´, aigari `dîner´, deiru `argent´, intzagur `noix´, etse `maison´, emon `donner (comme en biscayen), ler `pin´, oiltu `envoyer´, atziri `derrière´, izari ´mettre´, gentu `enlever´, ganti `à travers´ (souletin bas-navarrais gainti, gaindi):
38-Il partage également bon nombre de termes avec les autres parlers pyrénéens (salazarien et aezcoan) : ele `mot´, et ele erran `parler (cf. aezcoan elekatu `converser´), baia ´mais´, eur `personne (salazarien ior), eragu ´apporter, igari "passer".
39-D´autres termes typiquement roncalais sont en réalité des archaïsmes autrefois très répandus en euskara, mais qui sont toujours en usage dans cette vallée : kaur `ce´, laur `quatre´, ola `cabane´, solo `seulement (cf. Leizarraga solament).
40-D´autre part, le roncalais est un dialecte nettement oriental, c´est à dire qu´il partage une grande partie de son lexique et ses variantes lexicales avec les parlers basques continentaux : zomat `combien´, egotzi `jeter, orai `maintenant´, aitzin devant´, gibel `derrière´, xin `venir´, artio `jusque´, baratu `rester´, bortu `montagne, pyrénéen´.
SYNTAXE
41-Outre le traitement du zuketz, en roncalais était en usage une forme de respect similaire à celle du castillan, avec le pronom horrek =usted, vuecencia (vous) et une conjugaison à la troisième personne. La forme même du pronom (cf. le démonstratif korrek) semble indiquer une importation d´autres dialectes:
42-L´objet des substantifs verbaux peut être au génitif :
Gore erregiaren/Xinko Semearen/adorazera
43-Le suffixe verbal interrogatif -a existe comme en souletin et en aezcoan :
entelegatu duna zer erran duran?
44-Les comparatifs se font avec la particule ezik placée devant le terme de comparaison (cf. en euskara de Barranca l´emploi de ze):
Bizi nun ni hogeitalaur urte obro ezik ama
45-Dans les interrogatives indirectes absolues on emploie le suffixe -nez, comme en aezcoan et dans le dialecte de Salazar :
Aber onki egitan dugunez ezpartiña
46- Les relatifs ont tendance à être postposés. Cela pourrait être dû au castillanisme, mais la même caractéristique apparaît constamment dans les lettres de Mendigacha, et en réalité il doit s´agir d´un archaïsme (cf. Leizarraga anhitz Saindu lo ceunÿanen gorputzac iaiqui citecen. et similaires) :
Eta tio eramaitan guniena lagun